En toute discrétion, Yves s’en est allé.
Un dernier voyage, mais sans retour cette fois !
Lui qui se plaisait à toujours baguenauder par monts et vaux, sans mot dire s’est subitement décidé à s’esquiver par une porte dérobée, un peu comme si cet ultime vagabondage n’était autre que l’issue incontournable d’un homme avide de voyages. Des années se sont écoulées depuis ces jours où nouveau résidant en la commune, je me plaisais à partager des heures sur les terrains de boules de la Séoune à ses cotés, anecdotes fusantes à souhait, Roland, Philippe, Jacky, Gérard, Clément parmi d’autres encore s’affairant à ne point lui laisser le monopole de la vanne la plus épique sui soit. Le béret parfois de « traviolle » était signe lui, agrémenté d’un regard fixe et presque sombre, d’un évident passage caractériel souffrant d’une lassitude stagnante, au point dans la plupart des cas, qu’il mettait comme par inadvertance, un terme à la partie en cours, sans jamais malgré l’insistance de ses camarades de jeu, remettre en question sa décision de ne plus en découdre ! « Vous m’énervez j’arrête !» précisait – il alors brutalement, mais surement en avait-il tout simplement marre, le seul fait d’une insistance de la part des adeptes le suppliant, semblant ne point lui déplaire après tout. Ainsi il était, regard froid mais sourire en coin expressif, souvent accompagné d’une timide retenue, mots et phrases articulés distinctement laissant deviner l’absence de la moindre arrière pensée, ainsi s’évertuait-il à presque chacune de nos rencontres à me préciser « moi, je l’aime bien le Petit Journal, d’ailleurs je suis me suis abonné ! » En fin de compte, un personnage comme tant et tant d’autres, qu’il me plaisait particulièrement à rencontrer, que j’estimais de par la simplicité même qu’il dégageait, se plaisant à me narrer régulièrement ses pérégrinations touristiques régulières, un peu comme s’il ressentait une nécessité d’échanger à fin de tromper une indéniable et pesante solitude. Ainsi il s’en est allé, le plus discrètement qui soit, se flattant surement que sa mémoire ne pourra que s’effacer de la mémoire des hommes. Un dernier voyage qu’il gardera secret, comme n’appartenant qu’à lui seul, pour une éternité qui se doit d’être dorénavant sienne.