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"Le Blog de Patrice"
4 février 2016

Sur le marché de Montaigu, elle vendait ses cabécous!

cabecou
Revenue sur la terre de sa grand-mère. elle était l'avenir de ce village, avec néanmoins un projet qui n'aurait sûrement pas reçu l'approbation des directeurs financiers : elle élevait des chèvres et vendait des cabécous,  sur le marché hebdomadaire de Montaigu-de-Quercy. En mars 2014, elle fut la plus jeune candidate aux municipales de Valprionde,  commune lotoise limitrophe  de Montaigu. Désirant dorénavant  "faire sa vie ici" et  souhaitant s'impliquer dans la vie de la commune, elle possédait enthousiasme et forte  envie de faire des choses. Ainsi elle avait organisé une fête dans sa ferme, qui aurait pu devenir une fête de village. « Fais ta ferme à Saint Félix », en mai 2014. Elle m'y avait accueilli avec un grand sourire...Un arrêté municipal affichait alors des interdictions de stationner,  comme un "arrêté antiPerrine". Mercredi 13 janvier 2016 en l'église de la paroisse de St Félix où elle fut baptisée, une de ses amies sanglots dans la voix,  prononçait ces quelques phrases : « Perrine aimait la vie,  le feu dans la grande cheminée,  les fleurs des champs et surtout  se lever de bonne heure pour aller au marché» Nous étions une centaine, sanglots dans notre silence. Comme tout le monde,  je n'ai pas compris l'intégralité de cet hommage. Perrine  était là toute proche, mais sans y être,  juste ses cendres dans une urne. Elle avait été incinérée à Nîmes le 8 janvier à 14 heures. A cette-heure-là à Valprionde, des mains anonymes avaient sonné les cloches. Nous étions une centaine,  chrétiens,  athées, agnostiques. Nombre de femmes et d'hommes tristes, que le prêtre croisait sûrement pour la première fois. De "7 à 77 ans", de nombreux "jeunes". Le Père Alexandre BULEA sut s'adresser à tous, avec bonté, en homme également triste, de cette vie fauchée en pleine jeunesse. « C'est normal qu'on soit ému, vous comme moi, car on ne s'habitue pas à la mort. » Le Père Alexandre sut faire de cette église un espace ouvert, pour toutes et tous, un espace de recueillement. Il fut le prêtre qui admettait que l'on puisse ne pas croire en Dieu mais qu'au moment de la mort, quand la douleur est là, lui Père Alexandre bien modestement, est là. Pour accompagner. Sans chercher à profiter de la circonstance pour convertir ou culpabiliser... Il était là pour des gens sincères dans leur douleur. Il a su reprendre l'aphorisme d'une figure de notre idéal républicain : « on ne voit bien qu'avec le coeur, l'essentiel est invisible aux yeux. » (Antoine de Saint Exupéry) « Seigneur, nous avons du mal à comprendre que l'on puisse mourir si jeune. Et qu'une vie soit brisée alors qu'elle commençait à peine à s'épanouir... » En trois mots, il réglait le sort d'absences peut-être indécentes : « quand on est un homme important, il faut prendre des rendez-vous» « Je vais venir, exceptionnellement », comme il le dit, et le Père Alexandre accompagnait l'urne jusqu'à « sa dernière demeure.» Perrine passait "une dernière fois" sous le vitrail réalisé par Dagrant en 1890, représentant la fuite en Egypte, sur un âne. Dans sa petite ferme "utopique", elle accueillait également un âne. Lui était -il impossible de "vivre autrement" ? J'ai fixé sa photo... « elle était la vie... elle était... », effleuré l'urne noire posée devant une tombe ouverte, et suis parti. Un regard au loin vers la butte, où depuis 1933 Jean Dumont, le sabotier, repose dans son petit mausolée de libre-penseur. Rien à dire. Et puis que dire? Que dire ? Dans ma tête passaient bizarrement, des extraits de chansons, on est souvent ramené à sa propre histoire, ses influences,    "cette gamine-là m"était chère" « Les ongles encore accrochés Sur quelques lambeaux de mystère... J'ai vu la vallée dans le brouillard »(Gérard Manset). Perrine  nous a quittés à l'heure où sa commune disparaissait, annexée à Montcuq. En 2016 elle devait semble-t-il, rejoindre une école de berger, en Ariège.Elle serait entrée aux urgences aux premières heures de l'année, suite à une intoxication alimentaire... Vendredi 15 janvier 2016, ces mots cognent en moi au réveil... Je sais qu'il me sera douloureux de les écrire... Penser à "autre chose" ? Mais si je n'écris rien, qui accordera quelques lignes contre l'oubli à cette vie ?...Que puis-je faire d'autre ? Elle ne fut pas la première à ressentir la méfiance... euphémisme... et nous, les "mals accueillis du canton" n'avons pas su mettre en place unmouvement, une association, un endroit, que sais-je, pour permettre un peu plus de "lien social", malgré ceux qui n'en veulent pas. Elle s'appelait  Perrine BRUYERES, elle n'avait pas 30 ans. Cette gamine-là était et restera,  très chère à nombre d’entre nous !




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